La fessée
A cinq heures et demie, on a reçu un appel pour aller à la gare de Saint-Gratien. Un vieux monsieur avait reçu une fessée. De la part de trois jeunes. On s’est tous marrés dans le commissariat.
— Ça devient du grand n’importe quoi le boulot en ce moment, a dit Chorisson.
Et on s’est remis à rire. C’est vrai, qu’en ce moment…
On est partis à cinq, Lionel, Georgio, Lisa, Cynthia et moi. Trois filles pour deux mecs. On est arrivés à la gare. Le vieux en question était assis sur des marches, entouré d’un type de la SNCF. Il était vieux de chez vieux. Il pleurait. Dire que tout à l’heure on se marrait au commissariat, et que maintenant moi aussi j’avais envie de pleurer. Je me suis retenue, je sais faire, quand même.
Lionel a interrogé le type de la SNCF. Les trois jeunes étaient partis depuis un moment déjà. Georgio a demandé au vieux si ça allait. Il a secoué la tête pour dire non.
— Est-ce que vous pouvez vous lever ? j’ai demandé.
Il a encore secoué négativement la tête.
— Bon… on va vous aider.
Les deux garçons l’ont pris chacun d’un côté. Il s’est relevé sans problème.
— Vous avez mal ?
— Un peu.
Il se tenait la fesse. Mais moi je savais bien que ce n’était pas la douleur le problème. C’était l’humiliation. On l’aurait tapé et on lui aurait pris son portefeuille, ça aurait presque été préférable.